Olivier FLECHEUX - Xavier FLECHEUX - Sophie BLAZY

Protection fonctionnelle : Des précisions sur la notion de faute personnelle détachable des fonctions de l’élu

Dans deux arrêts rendus le 30 décembre 2015, le Conseil d’Etat est venu préciser la notion de « faute personnelle détachable des fonctions » de l’élu, qui empêche la collectivité territoriale d’accorder sa protection au maire lorsque celui-ci fait l’objet de poursuites pénales.

Dans ces deux affaires, était en cause la légalité de deux délibérations prises par un conseil municipal accordant au maire la protection fonctionnelle prévue par les dispositions de l’article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales dans le cadre d’appels formés par le maire contre deux condamnations pénales prononcées à son encontre par le tribunal correctionnel de Draguignan, l’une pour détournement de fonds publics à raison de l’acquisition par la commune de deux voitures de sport utilisées à des fins privées et l’autre pour provocation à la haine raciale à raison de propos tenus sur des campements de personnes d’origine rom.

Dans les deux espèces, le Conseil d’Etat confirme la suspension de l’exécution des deux délibérations litigieuses qui avait été demandée par le préfet et ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, en raison de la nature et de la gravité des faits reprochés.

Mais au passage, la haute juridiction annule les ordonnances rendues par la Cour administrative d’appel de Marseille, qui avaient rejeté les appels formés par la commune contre les ordonnances au seul motif que les faits au titre desquels la protection fonctionnelle avait été accordée au maire revêtaient un caractère intentionnel.

Selon le Conseil d’Etat, ni la qualification retenue par le juge pénal ni le caractère intentionnel des faits retenus contre l’intéressé ne suffisent à regarder une faute comme étant détachable des fonctions. En revanche, l’appréciation du caractère détachable de la faute commise par l’élu repose sur l’existence de faits « qui révèlent des préoccupations d’ordre privé, qui procèdent d’un comportement incompatible avec les obligations qui s’imposent dans l’exercice de fonctions publiques ou qui, eu égard à leur nature et aux conditions dans lesquelles ils ont été commis, revêtent une particulière gravité ». Et tel était bien le cas en l’espèce.

Il appartient donc au conseil municipal d’apprécier, sous le contrôle du juge administratif, si les faits pour lesquels l’élu est poursuivi, indépendamment de leur qualification pénale, revêtent ou non le caractère d’une faute détachable, dans les conditions rappelées par le Conseil d’Etat dans les arrêts ci-dessus mentionnés.

CE, 30 décembre 2015, n°391798 et n°391800.